FRArt L’archivage comme pratique de réappropriation collective et militante

1. Une page de l'édition documentant le mois passé dans l'espace d'archivage (juillet 2022)

  • type: Image
  • ref: DOC.2023.77
  • Creation date: 1 Novembre 2023
  • A page from the issue documenting the month spent in the archives (July 2022)
  • ACAREPraxis - image (1).jpg
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2. L’archivage comme pratique de réappropriation collective et militante : introduction

  • type: Article
  • ref: DOC.2023.78
  • Creation date: 1 Novembre 2023
  • description:

    L’archivage comme pratique de réappropriation collective et militante est un projet de recherche expérimental, artistique, militant et collectif qui explore les manières dont les personnes trans* de Belgique peuvent se réapproprier leurs histoires à travers 1) les archives institutionnelles belges, 2) leurs archives personnelles ainsi que 3) l’ensemble immatériel d’idées, de représentations, de récits et d'émotions dont elles disposent.

    Ce projet de recherche est initié par LoupKass et Nour Outojane. LoupKass travaille l’image fixe en argentique noir et blanc moyen format ainsi que l’image en mouvement avec un caméscope pour archiver ses alentours, ses proches, sa communauté. Nour est artiste et chercheureuse multidisciplinaire, sa pratique artistique  (illustration digitale, vidéo et installation) se nourrissant de sa recherche, et sa recherche (dans les filières des études culturelles, de genre et de sociologie) trouvant un lieu d'expérimentation dans sa pratique artistique. Nous sommes deux personnes trans* qui ont travaillé sur la question des archives au sein de différents projets personnels et collectifs, dont le projet His/her/their Stories sur lequel nous avons travaillé ensemble, en collaboration avec le collectif Mothers & Daughters et l’association Genres Pluriels, depuis décembre 2021. His/her/their Stories fut un projet de création d’un lieu collectif, interactif et en perpétuelle évolution pendant un mois.

    La recherche que nous vous proposons s’inspire des travaux de différent·es académicién·nes et elle est informée par le projet His/her/their Stories; elle en découle de manière organique. Pour préparer le lieu d’archivage du projet His/her/their Stories, nous avons fait des recherches dans les archives de l’archiefpunt du Fonds Suzan Daniel, de l’AMSAB-Isg, de l’AVG-Carhif et de la bibilothèque Rosa. Nous avons été mis·es face au constat de la violence épistémologique et administrative des archives institutionnelles.

    Les logiques de pouvoir à l'origine de l'exclusion et de l'invisibilisation des personnes trans* structurent les fonds d'archives des institutions qui ont historiquement eu pour rôle de les surveiller, les contrôler et/ou les punir (police, administration, médecine, etc.). En effet, les archives sur les personnes trans* présentes dans les centres d’archives institutionnels permettent de comprendre la violence dont les personnes trans* ont fait l'objet, tout en invisibilisant néanmoins bon nombre de ces personnes et de leurs expériences, en ne les donnant à voir qu'à travers le prisme (tant cognitif que pratique) des intérêts de ces institutions. La construction d'une mémoire propre aux personnes trans* doit dès lors passer par un processus de reconstitution et de réappropriation des archives institutionnelles, qui selon nous ne peut se faire que de manière collective.

    Ce projet de recherche explore les manières dont nous pouvons légitimer nos pratiques, nos expériences et nos connaissances pour nous saisir de notre puissance archivale (cf Sam Bourcier). Pour cela, nous proposons de désacraliser l’archivage comme une pratique confinée aux historien·nes, en la définissant comme une pratique artistique, collective et militante. Chacun·e d’entre nous peut archiver, créer des archives. Notre recherche s’organise donc autour de la question suivante :
    “En quoi se saisir de l’archivage, en tant que pratique collective, artistique et militante, peut permettre aux personnes trans* de Belgique de se réapproprier leurs histoires, en se servant 1) des archives officielles belges, 2) de leurs archives personnelles ainsi que 3) de l’ensemble immatériel d’idées, de représentations, de récits et d'émotions dont elles disposent?”.

    Pour y répondre, la recherche se divise en trois phases. Une première phase de recherche de traces de personnes trans* dans les fonds d’archives institutionnels ainsi que d’apprentissage auprès de militant·es et collectifs travaillant l’archive trans*, LGBTQIA+ ou queer. Une deuxième étape de trois résidences de trois jours dans des lieux privés, en dehors de la ville, durant laquelle six artistes et militant·es trans*, y compris nous deux, s’organiseront en autogestion et exploreront des méthodes de réappropriation de nos histoires. La troisième phase de recherche consiste en 1) une restitution sous forme de fanzines de nos moments de résidence et 2) trois ateliers de réappropriation d’histoires mis en place lors des résidences et adaptés aux nouveaux publics. Nous espérons que cette démarche sera une opportunité pour faire communauté autour des questions d’archives et qu’elle nous ancrera dans notre passé, donnant de la force à nos luttes présentes et futures.

    *En désignant les personnes trans*, nous désignons toute personne dont l’identité de genre est en décalage avec le genre qu’on lui a assigné à la naissance. L'utilisation de l'astérisque à la fin de "trans" est un moyen d'utiliser une expression abrégée pour désigner une variété d'identités diverses, telles que, mais pas uniquement : genderqueer, intersexe, intersexuée, non-binaire transféminine, au genre non conforme, homme trans, etc.